David Thual, lobbyiste à Bruxelles

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Lobbyiste. Un métier méconnu. On imagine l’homme tramant dans l’ombre, traquant les failles juridiques ou encore d’une éloquence tapageuse et s’appuyant sur un bataillon de relations « bien placées ». Rien de tout cela. Le lobbyiste est avant tout un homme (ou une femme) à l’écoute de ses clients. Nous l’avons rencontré en la personne de David Thual. Depuis 10 ans, ce jeune consultant défend les AOP fromagères et viticoles au niveau européen. Et plus largement toutes les Indications Géographiques de par le monde.

Ce Morbihanais, après une formation en droit européen et international, a travaillé pour différentes instances européennes à Bruxelles et Genève. Et même à Davos, comme attaché de presse. Un petit passage dans le service lobbying du groupe Pernod-Ricard puis dans un cabinet de consultants à Bruxelles, lui donne l’élan nécessaire pour monter son propre cabinet de « consulting ».

La rencontre avec les gens du Jambon de Parme sera déterminante. Puis ce sera le Comté, la Fédération européenne des vins d’origine (EFOW)… « Le fait de travailler avec des gens de terroir est passionnant et exigeant. Il faut en permanence apporter des résultats concrets », souligne David Thual qui apprécie la diversité de son métier « mêlant juridique et communication ».

Devenu « le » spécialiste des AOP à Bruxelles, il accompagne les projets, suscite des rapprochements. Ainsi, il participe à la création de l’association oriGIn (Organization for an International Geographical Indications) qui réunit 240 groupements de producteurs représentant 40 pays d’Europe, d’Asie et d’Amérique Latine. OriGIn se bat pour obtenir la création d’un registre pour la protection de toutes les appellations d’origine.

« Nous organisons, les AOP agissent »

La base du métier de lobbyiste, c’est l’information, être au fait de toutes les propositions des institutions européennes, des tractations à l’OMC (Organisation mondiale du Commerce). « Nous prévenons nos clients pour qu’ils puissent réagir par rapport aux nouvelles propositions juridiques et politiques qui se mettent en place. » Un rôle de chef d’orchestre aussi puisqu’il faut mettre en place un plan d’action, des outils (prises de position, amendements, communiqués de presse), organiser des réunions avec tel ou tel décideur… Il propose régulièrement des amendements aux Parlementaires européens. Le dernier en date devrait avoir une portée essentielle pour l’AOP Comté.

Préparé dans le cadre de la réforme de la politique européenne de qualité, il concerne la possibilité pour les organisations en charge des IG de pouvoir adapter l’offre à la demande. Ce texte, s’il est retenu, fera la navette entre le Parlement européen et le conseil des ministres de l’Agriculture car il doit être approuvé conjointement par les deux instances. Ce qui peut prendre entre 2 et 3 ans. Une réalité du fonctionnement des institutions européennes que le consultant décrypte pour ses clients. « Tous les ans, au niveau français, le Comté doit batailler pour faire reconnaître le rôle clé de l’ODG, d’une interprofession structurée, dans le cadre de son plan de campagne. Il reste un flou juridique, une incertitude, qu’une reconnaissance par le droit européen pourrait lever définitivement. Une question d’autant plus d’actualité avec la réforme de l’OCM lait et la perspective d’arrêt des quotas », enchaîne David Thual.

Une bonne écoute des parlementaires

Son cabinet compte 4 personnes et développe d’autres activités à la demande d’institutions publiques ou des Appellations comme la rédaction d’un manuel de présentation du système de protection des AOP et IGP dans l’UE pour la commission européenne, qui vient d’être traduit en chinois. Une passion personnelle pour l’Afrique l’a amené à réaliser une étude sur la sécurité alimentaire en Afrique Centrale dans le cadre d’un programme commun entre l’Union européenne et les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). « Un sujet d’envergure, mais nous avons tout autant de satisfaction à défendre une production de niche comme le Sel de Guérande, qui devrait bientôt obtenir son IGP. Une petite victoire et l’assurance de défendre un patrimoine ! ».

Un autre exemple de ces « petites victoires » encourageantes : une mission menée avec le CNAOL et la FNAOC pour faire changer la couleur du logo AOP (en rouge et jaune) et le distinguer des autres marques de qualité. « Il est rare d’obtenir 100% de réussite quand il faut arriver à convaincre 27 États membres et la Commission européenne ! ».

Mais globalement David Thual note la « bonne écoute » des parlementaires européens sur la question des AOP. « Même si la crise économique et monétaire a pris le devant de la scène, la qualité est devenue un vrai sujet d’actualité pour l’Europe ».

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