Le paysage nous en dit long…Fertans (juin 2019)

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Le plateau d’Amancey, un terroir riche cependant soumis aux aléas climatiques

Le secteur d’Eternoz avec ses haies et au second plan, le faisceau salinois et la butte de Montmahoux.
Le secteur d’Eternoz avec ses haies et au second plan, le faisceau salinois et la butte de Montmahoux.

Par Pascal Bérion
Maître de conférences en Aménagement de l’espace et urbanisme
Université de Franche-Comté / Laboratoire ThéMA UMR CNRS 6049

Les 24 exploitations de la fruitière de Fertans (Plateau d’Amancey) utilisent environ 2 800 ha de terres, dont 80 % de prairies naturelles. En 1854, ce territoire comportait treize sociétés de fromageries (dont 7 fondées avant la révolution française) qui ont produit au total 170 tonnes de fromages. Les 535 producteurs de l’époque disposaient de 1 493 vaches laitières, soit à peine trois vaches par exploitation, dont le lait permettait de fabriquer 300 kg de fromages par an, d’une valeur de 250 francs.
Le terroir de la fruitière actuelle s’organise autour de trois unités agro-paysagères bien indentifi ables et complémentaires les unes par rapport aux autres :

La première correspond au plateau d’Amancey dont l’altitude moyenne est d’environ 650 mètres. La topographie est clémente avec une surface relativement plane fortement marquée par l’érosion karstique avec de douces dépressions. Il en résulte une diversité de configurations agronomiques, avec des secteurs à sols profonds, qui accueillent des cultures et des prés de fauche et d’autres aux sols plus légers où les affleurements rocheux sont fréquents et que l’on réserve aux pâturages. De nombreux bosquets et haies sont installés aux limites des parcelles.
• La deuxième est composée par les reculées de la Loue, du Lison et de leurs affluents qui ceinturent à l’Est, au Nord et à l’Ouest le plateau d’Amancey. De puissants vaux découpent la surface sur plateau et produisent un paysage original, avec des falaises sommitales et des pelouses marneuses faisant l’objet d’un classement en zone Natura 2000. Le fond des vallées est souvent occupé par des forêts installées à la place d’anciens prés. Ici, les espaces agricoles forment des clairières (Alaise, Saraz) ou sont installés sur des lambeaux étroits de plateaux isolés par les reculées secondaires des affluents de la Loue et du Lison (Eternoz, Doulaize, Lizine).
• La troisième est située sur le « faisceau salinois ». Les altitudes s’étagent entre 700 et 800 mètres et le relief prend une morphologie typique du Jura, puisque les villages et les espaces agricoles s’inscrivent dans un val s’étirant sur un axe Nord-Est Sud-Ouest. L’enrésinement de la forêt est ici un trait important de l’identité paysagère.

La fruitière de Fertans affiche aujourd’hui une belle réussite sociale et économique, attestée par le renouvellement des exploitants et l’installation de stabulations modernes et bien équipées. Par-delà cette réussite, des risques potentiels ne doivent pas être occultés. Ce terroir assure de bonnes récoltes de foins et d’abondantes pousses d’herbe dans les pâtures si et seulement si les précipitations sont régulières et alternent avec des périodes de beau temps qui permettent d’effectuer les récoltes. Or, les modifications climatiques supportées depuis plusieurs années avec des printemps parfois trop humides (2012 et 2016) ou des sécheresses d’une intensité jusqu’alors inconnue (2018) interpellent. Elles invitent les éleveurs à développer des stratégies d’adaptation leur permettant de faire face à l’aléa climatique, qui semble bien se dessiner comme la principale contrainte des années à venir.

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