L’accord limpide : avec un AOC Bugey chardonnay

L’histoire a l’air toute simple comme ça, mais elle est en réalité plus complexe en bouche. Ce chardonnay fruité et minéral, rond et généreux, est de prime abord un peu chahuté par le comté de 20 mois que nous lui présentons. Pour la bonne cause, car fromage et vin abattent tous leurs atouts et s’expriment pleinement lors de cette rencontre: le sel du premier fait ressortir le fruité du vin et sa fraîcheur, sa texture dense et à peine granuleuse s’adoucit et s’allège au contact du second, les arômes de pêche et d’agrume se mêlent à la noix et le cèpe, la vanille, le lacté au fumé. Un accord très confortable mais pas ennuyeux !

L’accord exotique : avec une AOC Roussette du Bugey

Le cépage Roussette est emblématique tu terroir bugiste, et se distingue par sa large palette aromatique lorsque le vin est épanoui, avec des touches de coing, de fruits exotiques, de tilleul, parfois de truffe blanche … pour elle, le fromager a sélectionné un comté très pâle et dense, de 9 mois, à la texture paresseuse et fondante, étonnant avec ses notes de foie gras et de zeste de citron. En bouche l’accord se déroule tout en douceur, notamment grâce à la matière du fromage, qui aide les arômes du vin à se révéler les uns après les autres et met en exergue sa vivacité, laquelle à son tour réveille le fromage et une richesse gustative insoupçonnée. Un très beau moment, prolongé par une persistance aromatique enrichie par les deux protagonistes.

L’accord tonique : avec un AOC Bugey brut méthode traditionnelle

Pourquoi ne pas tenter de taquiner le Comté avec quelques bulles, l’une des grandes spécialités de l’AOC Bugey ? Notre choix se porte vers un extra brut 100% chardonnay, élevé trois ans sur lattes. L’objectif : aller chercher chez ce vin de plus de 4 ans des arômes d’évolution, riches, complexes, des notes miellées, de fruits secs et de foin, une petite touche de zeste de citron confit… Fruité ou plus âgé, le Comté se trouve ici en terrain familier, comme chez lui. Voici que l’effervescence vient le chatouiller un peu. Les bulles aèrent sa texture et révèlent des arômes plus délicats de fruits mûrs et de fleurs, chassent le charnu et le gras pour une expérience moins terre à terre, mais très terroir.

L’accord foufou : avec une jeune mondeuse AOC Bugey

On connaissait les accointances des vins issus de mondeuse noire avec le ramequin du Bugey, spécialité fromagère aussi locale qu’odorante. L’idée de départ est la suivante : puisque la Mondeuse, avec ses arômes sauvageons de laurier frais et de menthe, de fruits noirs, de cerise et de poivre frais, ne craint pas les mets fougueux et sait arrondir les angles, tentons de lui associer un jeune Comté. Portrait du candidat : nez très franc aux arômes d’étable, de pelage chaud, de caillé et de jeune beurre, un peu d’oignon, texture souple et élastique. Le rendez-vous commence par un bref malentendu, ce qui est logique entre ces deux mal-lunés. Puis nos deux larrons fanfaronnent dans une joyeuse foire, chacun s’exprimant à son tour. La Mondeuse adoucit l’acidité du Comté, qui pousse sur le devant de la (s)cène la cerise du vin, qui offre à son tour quelques épices et de complexité au fromage.

L’accord inattendu : avec une fine du Bugey 1995

Très beau voyage que celui-ci, comme souvent lorsque l’on décide de partir en escapade à la dernière minute. La proposition désoriente au départ, puis la curiosité l’emporte. On se tourne naturellement vers un Comté un brin âgé (20 mois), dont on attend des arômes plus concentrés, plus puissants, plus persistants. On compte sur la texture dense et un brin rugueux de la pâte pour adoucir la flamme de l’alcool, et on mise sur le gras du fromage pour réveiller et révéler les arômes les plus délicats de cette Fine du Bugey très généreuse. Afin de mieux apprécier la rencontre, on prendra d’abord le fromage en bouche en le mâchant doucement et en le laissant se réchauffer. Il sera temps alors de lui ailler la Fine. Et voici que l’un et l’autre se chamaillent un peu, la Fine disant fruits confits, le Comté répondant fruits secs. Quelques épices se mêlent à la discussion, le sel rapplique et chatouille la sucrosité de la Fine. Une poignée de secondes plus tard, Fine et Comté s’accordent en beauté pour offrir une finale étonnante où défilent le cèpe séché, le café, le cacao, le moka, la noix torréfiée, le beau cigare… le temps s’arrête. En résumé : Bach, suite pour violoncelle n°1 (prélude).

Des accords subtilement caractérisés en collaboration avec le Syndicat des Vins du Bugey et Caroline Daeschler, sommelière-conseil Mots et Vin.