La coop de Saint-Julien-Sur-Suran, un collectif efficace

p12 - Coop Saint-Julien groupe - Thierry Petit

Cette coopérative de la Petite Montagne (Jura) a constamment rénové son outil de production depuis 1995. Elle affine et commercialise elle-même une grande partie de ses Comté.

Historiquement, la coopérative fromagère était au cœur de la commune, à La Rivière. En 1995, en même temps que la fusion avec Louvenne, les coopérateurs ont déménagé l’atelier de fabrication près des caves d’affinage déjà existantes, à la sortie du village. « Ils ont rasé l’ancienne porcherie et construit la fromagerie dans le prolongement des caves », explique le président, Christophe Drapier. Spécificité de la coopérative : elle affine et commercialise une grande partie de ses Comté. Saint-Julien a donc effectué, au cours de son histoire récente, de nombreuses modernisations de son atelier de fabrication, mais aussi plusieurs vagues de rénovation et d’agrandissement de ses caves. 6 000 places supplémentaires en caves ont été installées en 2017, avant un nouvel agrandissement similaire l’an dernier. Un nouveau magasin a vu le jour en 2020, l’ancienne boutique servant désormais de local pour la préparation des commandes en demi-gros.

Minimiser les consommations d’énergie

Cette coopérative, l’une des plus conséquentes en volume de l’AOP Comté, concilie une qualité de Comté irréprochable, tout en garantissant le respect de l’environnement. En 2017, puis en 2022, l’isolation complète du bâtiment a été réalisée, en même temps que des travaux de récupération d’énergie des groupes froids afin de chauffer l’eau et de faire fonctionner le séchoir à planches. D’autres investissements sur les systèmes de pressage ont eu lieu pour minimiser les consommations d’énergie. En 2022, l’assainissement, raccordé à la station intercommunale, a été entièrement mis aux normes avec la création d’un bassin tampon capable d’isoler deux jours et demi de rejets et de gérer les moments propices pour les insérer dans le réseau collectif. Grâce à tout cela, la coopérative, qui a doublé sa production et sa surface depuis 1995, n’a pas augmenté ni sa consommation d’énergie, ni sa charge polluante.

Un collectif soudé

Surtout, sa réussite repose sur un collectif humain solide et performant : les quatre membres du bureau forment une équipe très soudée avec les fromagers, emmenés par le fidèle Jean-Marie Parsus. Le président, son trésorier Olivier Rochet et les deux vice-présidents, Simon Ioni et Anthony Guillaume, font part de leurs projets chaque mois aux quinze membres du CA. La qualité des laits est au centre des préoccupations avec, en ligne de mire, celle des Comté. « En vingt ans, nous avons appris à fonctionner ensemble, avec une idée directrice : si la qualité de nos fromages est bonne, le commerce sera plus simple et nous serons tous fiers. »

Jean-Marie Parsus, le fromager enfant du pays

Jean-Marie Parsus (tout à droite) avec Gaylor Cottin (aide-fromager), Manon Bourgeois (seconde), Hassan Oncu (second) et Fabrice Didier (aide-fromager et chauffeur)

Le maître d’un producteur qui livrait son lait à cette fruitière ! S’il a -fromager de Val Suran est un enfant du pays, fils embrassé le métier, Jean-Marie Parsus le doit « à un concours de circonstances ». « J’ai réalisé un job d’été à la coop en 1985-86 qui m’a plu. J’ai donc envisagé d’en faire carrière. Le fromager d’alors, Daniel Bozon, m’a dit : je te prends en apprentissage si tu te formes à l’école. Nous en avons beaucoup discuté avec mes parents et je suis entré à l’Enil de Poligny pour obtenir mon CAP en 1990, puis mon BP en formation adulte un an plus tard. »
A sa sortie d’études, le fromager s’est expatrié six ans en Haute-Savoie, jusqu’en 1996, pour fabriquer du Reblochon dans deux structures de tailles différentes. Puis, retour au pays ! A Saint-Julien, il est devenu second de 1996 à 2001, date à laquelle il est passé maître-fromager. Pour lui, un bon fromager doit en premier lieu avoir la passion. En second lieu, il doit faire preuve d’un sens aigu de l’observation, d’une écoute attentive et savoir se remettre en question. « Celui qui réunit tous ces critères devrait s’en sortir plutôt bien dans le métier », assure cet homme dynamique.

Faune & Flore locales

La mulette épaisse / Unio crassus

Cette moule d’eau douce est très menacée car sensible à la qualité de son habitat. Elle vit surtout dans des cours d’eau peu profonds qui circulent au sein des pâtures et prairies des plaines alluviales (vallée de la Saône, Ognon, plaine doloise, Bresse comtoise, Petite-Montagne, etc.) Du fait des interactions avec les milieux terrestres associés, une bonne gestion des rives et le maintien de cordons autour des rives gérés de façon extensive favorisent la préservation de ce fragile bivalve.

L’orchis brûlé / Neotinea ustulata

Cette orchidée discrète fleurit début mai dans les pelouses pâturées de manière extensive et les prairies maigres de fauche. Les boutons sont noirâtres, donnant l’impression que l’extrémité de la grappe florale a été calcinée, d’où le qualificatif de « brûlé » que l’on a donné à la plante. Cette espèce est très sensible aux amendements et à l’intensification. Les pelouses à orchis brûlé sont souvent riches en espèces à fleur.

Un Comté enveloppant

Les Comté de Saint-Julien-sur-Suran présentent une belle diversité aromatique, sur des fromages âgés de 9 à 15 mois. Au nez, la pâte libère des notes réconfortantes de brioche et de pâte au gratin lorsqu’on la casse du bout des doigts. Une note vanillée vient même pointer le bout de son nez ! En bouche, les arômes proposent une large gamme de torréfié : brioché, oignon blondi à grillé et même chocolat noir. La saveur acidulée (sucré-acide) apporte du relief au côté des notes de lait caillé ou petit lait acidifié, cités par les dégustateurs. Le fruité n’est pas en reste, porté par des arômes d’agrumes, de noix sèche et de miel toutes fleurs. On retrouve une note de cuir sur les vieux fromages et parfois d’épices. La texture, plutôt résistante en bouche avec un peu de microstructure, ne manque pas d’onctuosité tout au long de la dégustation.

Le mot de l’affineur

Cette fruitière fournit une production très régulière en qualité. Son niveau technique est remarquable et l’ambiance au sein du conseil d’administration très chaleureuse. Le maître fromager, aidé par son équipe, assure un suivi très rigoureux de ses fabrications. La qualité des fromages a progressé d’année en année, avec pas moins de six médailles obtenues au Concours Général Agricole de Paris depuis 2014, dont la dernière en argent obtenue en février pour son Comté fabriqué en septembre 2021. Bravo à eux ! Ce terroir de Petite Montagne, affiné au Fort des Rousses, donne des saveurs délicates et des textures très agréables vers 15 à 18 mois. 

Bertrand Henriot, Fromageries Arnaud
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