Le paysage nous en dit long…Saint-Martin-du-Fresne (février 2020)

Le village de Chevillard sur les hauteurs de Saint-Martin-du-Fresne.
Le village de Chevillard sur les hauteurs de Saint-Martin-du-Fresne.

La Combe du Val, au coeur du Haut-Bugey

Au premier plan, les vaches broutent dans la vallée de l’Oignin. Au loin, on devine le village de Saint-Martin-du-Fresne.
Au premier plan, les vaches broutent dans la vallée de l’Oignin. Au loin, on devine le village de Saint-Martin-du-Fresne.

Par Pascal Bérion
Maître de conférences en Aménagement de l’espace et urbanisme
Université de Franche-Comté / Laboratoire ThéMA UMR CNRS 6049

Le terroir de la fruitière de la Combe du Val se localise, dans l’Ain au cœur des monts du Bugey, près de Nantua et d’Oyonnax. Il appartient à la partie méridionale du massif du Jura et se compose d’un relief façonné conjointement par les plis des chainons montagneux qui organisent la montagne et par d’importantes traces et dépôts d’origine glaciaire qui se sont accumulés dans les fonds de vallées, les bas versants et les dépressions anticlinales.

La fruitière collecte et transforme 5,5 millions de litres de lait produits par 15 élevages dispersés sur une dizaine de communes. Le système de production est très extensif. La productivité laitière moyenne est de 2 200 litres de lait/ha. Les exploitations sont vastes, la superficie moyenne est de 160 ha (seules 3 fermes font moins de 100 ha). L’espace agricole est essentiellement occupé par des prairies permanentes. Quelques céréales sont cultivées dans les secteurs situés en dessous de 600 mètres d’altitude. Elles sont utiles pour élaborer, directement sur la ferme, un aliment complémentaire aux foins et regains, fournir de la paille pour les litières du bétail et renouveler la flore des prairies.

Le terroir de la Combe du Val correspond au bassin versant de la rivière Oignin et de ses affluents. Elle s’écoule du sud vers le nord pour rejoindre l’Ain à Coiselet, en bordure du département du Jura. Sur le plan topographique, il est composé par trois unités :

Les plis des Monts-d’Ain : situés à l’est, ils appartiennent au Haut-Bugey et forment une véritable barrière presque exclusivement occupée par des forêts. Le seul finage qui s’y déploie est celui de la commune de Chevillard. Témoin de sa topographie vigoureuse, l’autoroute A40 passe sous la montagne par le tunnel de Chamoise. En direction du nord, cet ensemble est coupé par la cluse de Nantua et son lac.

Au centre, la Combe du Val forme une douce dépression qui s’incline du sud vers le nord sur environ 25 kilomètres (les altitudes passent lentement de 700 à 450 mètres) pour seulement 2 à 4 kilomètres de largeur. Il s’agit géologiquement d’un anticlinal remblayé par d’importants dépôts lacustres et fluvio-glaciaires déposés lors de la dernière glaciation du Würm (qui a pris fin il y a 10 000 ans).

A l’ouest, se trouvent l’anticlinal du massif de l’Avocat et les plis du faisceau dit d’Orgelet à Poncin principalement occupés par des forêts. Les espaces agricoles forment de vastes clairières comme à Sonthonnax-la-Montagne.

Les villages s’organisent en agglomérations qui s’étirent le long des axes de circulation. L’architecture présente de fortes similitudes avec celle des villages de la petite Petite-Montagne dans le Jura voisin. De nombreuses maisons sont organisées selon le principe des fermes en bande. Plusieurs églises sont coiffées de clocher à impériale, plus communément dénommés clochers comtois (il en est ainsi à Vieu d’Izenave, Lantenay, Izenave et Izernore). La production de fromages et l’organisation en fruitière est ancienne. En 1892, ce terroir hébergeait 16 ateliers de fromageries. La source consultée mentionnait qu’elles produisaient du Gruyère et du Bleu.

Le paysage et l’organisation du sol du terroir de la fruitière de la Combe du Val ont connu de puissantes modifications au cours du dernier demi-siècle.

Tout d’abord, l’urbanisation s’est étendue sur des superficies fort conséquentes. Le développement de l’industrie (proximité d’Oyonnax) s’est accompagné d’une part de l’aménagement de vastes zones d’activités pour accueillir les usines et leurs prestataires et d’autre part de la création de lotissements résidentiels occupés par des maisons individuelles. Le cas de la commune d’Izernore est emblématique de cette évolution. Ensuite, de grands équipements autoroutiers ont été installés. Il s’agit des autoroutes A40 et A404 dont les emprises au sol sont conséquentes (présence d’un nœud autoroutier à Saint-Martin-du-Frêne à proximité de la fruitière). Enfin, l’agriculture s’est restructurée. Les parcelles d’openfield en lanière des années 1950 laissent aujourd’hui la place à des blocs de grande taille. Les terres médiocres, situées sur les pentes et jadis occupées par des pâturages maigres et séchants ont été délaissées et sont remplacées par de la forêt.

La fruitière de la Combe du Val s’organise autour d’un système d’élevage herbager de moyenne montagne très extensif dans un contexte de forte pression de l’urbanisation. Situé au sud de la zone AOP Comté, elle participe pleinement à sa dynamique. Il en tient pour preuve que la typicité de son Comté a été honorée par une médaille d’or au Concours Général Agricole de 2019.

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