Le revenu est dans le pré (mai 2012)

Mouthe, vue d'avion
Mouthe, vue d'avion
Après la première révolution fourragère, qui fut celle de la mécanisation de la récolte de l’herbe dans les années 50, se profile aujourd’hui une 2e révolution fourragère : celle de la gestion de l’herbe pour améliorer son revenu et son bilan carbone. Voilà le nouveau défi à relever !

Pour illustrer ce dossier, nous avons pris l’exemple d’exploitations en lait à Comté situées dans des environnements différents (montagne, plaine) et confrontées à des défis à relever pour maintenir une alimentation fourragère suffisante face à la sécheresse ou aux dégâts de campagnols.

Le rôle et la valorisation des prairies y sont vus sous 3 angles, économique, technique et environnemental.

Des notions qui ne peuvent être séparées les unes des autres car elles sont complémentaires et interdépendantes.

Il ne s’agit plus forcément de “produire plus pour gagner plus”, mais de “produire mieux pour gagner plus ”. La question est particulièrement d’actualité avec la suppression des quotas laitiers. Intensifier la conduite du troupeau peut contribuer à déséquilibrer le système fourrager et à augmenter la dépendance des fermes aux achats d’aliments extérieurs. Dans un contexte de réchauffement climatique et de fluctuation des cours, avec des aléas qui s’invitent de plus en plus souvent dans les fermes, c’est alors la robustesse des exploitations qui risque d’être entamée sur le long terme, pour des gains de production minimes et aléatoires sur le court terme.
L’AOP Comté souhaite garder un lien fort avec le pâturage, un lien qui peut être compromis par l’intensification. L’appellation a su poser des limites, dans son cahier des charges notamment, et continue de les faire évoluer, si nécessaire, tout en renforçant son plan de contrôle.

Rappels réglementaires (tout d’abord)

Le cahier des charges de l’AOP Comté fixe des bornes techniques à l’intensification des surfaces et à l’intensification animale en limitant le concentré, le chargement et la production laitière.

1 hectare d’herbe par vache minimum
• Alimentation complémentaire plafonnée à 1 800 kg par vache et par an
• Chargement du cheptel laitier de l’exploitation plafonné à 1,3UGB/ha* de surface fourragère
• Productivité laitière par hectare plafonnée à 4 600 kg de lait/ha
• Interdiction des aliments fermentés (ensilage et balles enrubannées) sur toutes les surfaces de l’exploitation.
• Pas plus de 3 épandages par an
• 120 unités d’azote total par hectare de surface fourragère par an maximum, dont pas plus de 50 unités sous forme minérale
• Affouragement en vert : 1 repas par jour maximum
*UGB : unités de gros bétail (1 vache = 1UGB).

Attention ! Renforcement du plan de contrôle en 2012 sur les points suivants :

Utilisation excessive de concentré
• Présence de balles enrubannées dans les exploitations
• Affouragement en vert : non tenue d’un cahier de pâturage et d’un cahier d’enregistrement des récoltes en vert
Les abus considérés jusqu’à présent comme des écarts “mineurs” au cahier des charges (à des fins pédagogiques) deviennent “majeurs” ou “graves” en cas d’écart important ou de récidive. Les sanctions seront donc plus rapides.

Une initiative du groupe « herbe » : Connaître le nombre de repas disponibles !

Des spécialistes du conseil en élevage (chambre d’agriculture, contrôle laitier) des départements du Doubs, du Jura et de Haute-Saône ont pris l’habitude de se réunir régulièrement pour échanger sur la place de l’herbe et de l’autonomie alimentaire dans les exploitations.

L’objectif est de valoriser au maximum l’herbe par le pâturage. De là est né le groupe “herbe” qui, depuis 2 ans, accumule des connaissances sur la croissance de l’herbe dans les différentes zones géographiques et propose une Météo de l’herbe, bien utile en saison, et diffusée chaque semaine. En parallèle, quelques fermes pilotes vont tester, dès cette année, un outil informatique mis au point par l’INRA, “Herb’Avenir”, qui permet de connaître les jours d’avance en nombre de repas d’herbe dont dispose l’exploitation. L’idée étant de “mettre la bonne surface d’herbe en face des vaches”. Cette démarche sera présentée lors des rencontres collectives de type “tours de pâturage. »

Photo : Au pâturage, la priorité est de faire manger un maximum d’herbe aux vaches laitières. Selon les recommandations issues des recherches INRA et de l’Institut de l’élevage, il est préférable de faire entrer les vaches dans la parcelle lorsque l’herbe atteint une hauteur de 12 cm et les faire sortir lorsque l’herbe descend à 6 cm.

Mouthe, vue d'avion
Mouthe, vue d’avion

Fertilisation : toutes les prairies n’ont pas les mêmes besoins

L’AOP Comté indique dans son cahier des charges les conditions d’utilisation des engrais de ferme et engrais minéraux. La règle est de ne pas dépasser 3 épandages par an et au maximum 120 unités d’azote total par an, dont pas plus de 50 unités sous forme minérale.

Dans ce cadre réglementaire, il est aussi nécessaire d’améliorer ses pratiques de fertilisation. La tendance générale constatée va plutôt à une standardisation des fumures alors que les techniciens conseillent aujourd’hui d’adapter les pratiques à la parcelle. Pour cela il faut connaître les différents types de prairies existants sur l’exploitation, ce qu’on appelle aussi la “typologie des prairies”, dans l’ordre décroissant de valorisation : pâtures à vaches, prés de fauche pour faire le fourrage des vaches, pâtures à génisses, prés de fauche pour génisses. Sur une exploitation, il est possible de regrouper les prairies selon leur utilisation et de constater que les exigences de production ne sont pas les mêmes en quantité et qualité. Il est clair qu’une parcelle de foin pour les vaches n’a pas nécessairement besoin d’être conduite comme une parcelle de foin à génisses. Les premières devant être sécurisées en priorité.

La fertilisation apportée après la première coupe n’est pas forcément efficace sur le rendement fourrager puisqu’elle a plutôt tendance à favoriser une pousse d’automne qui aura du mal à être valorisée par le troupeau. L’herbe qui intéresse l’éleveur est l’herbe de printemps. La fertilisation au printemps sera mieux captée et valorisée si elle n’est pas apportée trop tôt mais juste au moment où l’herbe verdit et commence à pousser. L’idée n’est pas d’augmenter la fertilisation globale sur l’exploitation mais de revoir la répartition des apports au moment des besoins. Ces besoins peuvent varier aussi selon les qualités du sol, profond ou léger, et du chargement à l’hectare.

Photo (haut) : La quantité d’engrais apporté peut être différente selon que l’herbe est destinée aux vaches ou aux génisses.

Doubs, vue d'avion
Doubs, vue d’avion
Chapelle des Bois vue avion
Chapelle des Bois vue avion

Témoignage : le GAEC du Plateau de Landresse parie à 100% sur l’herbe

Laurent (à gauche) et Sylvain Henriet gèrent le pâturage avec deux objectifs : qualité et économie.
Laurent (à gauche) et Sylvain Henriet gèrent le pâturage avec deux objectifs : qualité et économie.

Sur le plateau de Landresse, dans le Doubs, à 700 m d’altitude, l’herbe est le pilier de l’alimentation du cheptel laitier.
L’exploitation de Sylvain et Laurent Henriet, installés en GAEC, est de type “montagne extensif” avec 118 ha de prairies, 15 ha de céréales et un troupeau de 65 vaches montbéliardes. 400 000 litres de lait sont produits par an et livrés à la coopérative de Pierrefontaine-les-Varans pour être transformés en Comté.

Les 2 frères axent leurs efforts sur l’autonomie
Autonomie dans l’alimentation des animaux : les céréales sont auto consommées, les vaches pâturent sur 70 ha, d’avril à mi-novembre, sans apport d’aliments complémentaires pendant certains mois, et 5 ha d’herbe sont transformés en granulés déshydratés.
Autonomie en eau et en énergie : l’exploitation dispose d’une source et récupère l’eau de pluie, des panneaux solaires préchauffent l’eau utilisée à la laiterie et le séchage en grange sera équipé cette année d’un toit photovoltaïque qui fournira de la chaleur pour sécher foin et regain. Autonomie financière enfin, en limitant les emprunts : les projets doivent s’autofinancer.

L’exploitation n’est pas figée dans un système
Les frères Henriet sont à l’affût des évolutions techniques qui sont en cohérence avec leurs convictions. Ils ont arrêté de donner du fourrage sec en complément l’été. « On n’y croyait pas mais c’est flagrant : plus de refus à faucher ». Ils vont changer de système de récolte et remplacer la faneuse par un retourneur d’andain dans toutes les parcelles où c’est possible, c’est-à-dire sans obstacles naturels. « Cette technique permet d’obtenir un foin magnifique, avec des brins entiers. Nous verrons si cela a un impact positif sur la production ». Ils envisagent d’installer une 3e cellule de séchage pour mieux trier les foins et regains, par qualité, en séparant le fourrage moyen (foin de lisière de bois et paille enherbée destinée aux génisses).
Pour rapprocher le pâturage du bâtiment, ils ont participé à des échanges de parcelles entre agriculteurs et laissé les parcelles les plus éloignées, une dizaine d’hectares au total. « On s’en remet ! On est bien mieux avec nos parcelles sur place ».

De l’herbe concentrée
La ration des vaches laitières va également évoluer. Elles ne reçoivent déjà plus aucun tourteau en complément du pâturage, seulement des céréales (épeautre ou mélange orge-avoine-pois). « Nous allons essayer de passer à 100 % herbe sur les meilleurs mois de pâturage. Et pour le reste de l’année, l’utilisation de granulés d’herbe déshydratée va remplacer avantageusement les concentrés et peut-être nous permettre d’arrêter l’achat de tourteaux, en vérifiant que la ration est équilibrée en énergie et protéines ».

Quantité annuelle d’aliments complémentaires : 950 kg par vache et par an, ce qui correspond en moyenne, sur l’année, à 115-130 g par litre de lait produit.

« Travailler mieux pour gagner plus ».- Pour le Gaec du Plateau de Landresse, l’herbe à une finalité : faire du lait à Comté. « La recherche de l’autonomie en herbe est à relier au produit lui-même, au Comté. Les meilleurs mois de pâturage, où l’herbe approche les 1 UF*, concordent avec les meilleurs mois de qualité du Comté », remarque Sylvain Henriet. L’éleveur attache aussi de l’importance à la taille du troupeau : « Si le troupeau est trop important, le pâturage est moins facile à organiser, le temps de traite dépasse une heure et les vaches sont plus fatiguées. Le bien-être de l’animal compte, ce dernier nous le rend en production : moins de stress, une bonne fertilité, une meilleure qualité du lait sans doute… »
Avec l’arrêt des quotas, le Gaec envisage-t-il d’augmenter sa production de lait ? « La limite, c’est ce que nos champs sont capables de fournir. Sur une ferme comme la nôtre, on pourrait augmenter la capacité laitière de 5 %, pas plus. Mais ce n’est pas notre premier objectif : nous voulons une exploitation stable, vivable, viable et transmissible. L’idéal ce n’est pas de travailler plus, mais de travailler mieux pour gagner plus. Et puis ces surplus de lait seront difficilement absorbés par la filière Comté et peu rémunérés!»

*UF : L’Unité Fourragère sert à exprimer la valeur énergétique d’un fourrage.

Le pâturage pour lutter contre les campagnols

La Franche-Comté connaît la plus forte poussée de campagnols terrestres de ces dernières années avec plus de 40 000 ha touchés. Les 2 dernières vagues datent de 1998 (20 000 ha) et 2003-2004 (25 000 ha). Les rongeurs détruisent les prairies et ont un effet sur la qualité des fourrages et des laits par contamination avec la terre. Le préjudice peut être énorme : à titre indicatif, sur une ferme de 50 ha, il peut atteindre 15 000 euros par an.

Dominique Mougin et André Delavelle 2012
Dominique Mougin et André Delavelle 2012

André Delavelle, président de la FDGDON (1) du Doubs, organisme de lutte contre les nuisibles, rappelle que la lutte contre les rongeurs doit être collective et peut s’organiser autour de 2 priorités :
– enlever les taupes
– détruire leurs galeries qui servent aux campagnols.
Le pâturage grâce au piétinement des vaches élimine une bonne partie de ces galeries. Dans les parcelles qui ne sont pas pâturées, l’utilisation d’outils (Actisol, rouleaux à plots) reproduit l’effet du piétinement. 

De plus, le pâturage d’automne “nettoie” les prairies en limitant la ressource alimentaire disponible pour les campagnols. L’alternance fauche-pâture est donc conseillée.

Intervenir avant le seuil de 200 campagnols/ha

Une prairie peut facilement atteindre le seuil de 200 campagnols par ha sans aucun signe visuel, car les petits rongeurs se déplacent incognito dans les galeries creusées par les taupes. « À ce stade, il est déjà trop tard pour limiter la pullulation de campagnols ». 
La première étape de lutte consiste donc à enlever les taupes et détruire les galeries. Il est alors plus facile de repérer le 1er indice de présence de campagnols qui est l’apparition de tumuli, plus petits que les taupinières et composés de terre fine et de radicelles. Ce qui permet d’intervenir ponctuellement, en distribuant 20 g de blé traité* à la main, « sans charrue à blé car ce système recreuse des galeries ». La “boîte à outils” de lutte contre les campagnols, mise au point par la FREDON (2), préconise aussi un labour et la remise en culture avec des céréales pendant 3 ans.

Ce qui permet également de gagner en autonomie alimentaire et d’avoir un peu de paille à disposition. « Sur notre secteur de Charquemont, nous avons adopté ces différentes méthodes : enlever les taupes, détruire les galeries, implanter des céréales… Depuis 10 ans, nous sommes tranquilles avec les campagnols. »

*1 à 2 kg par ha d’appâts prêts à l’emploi
(1) et (2) : Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles (FDGDON) et Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON)

Les pullulations de campagnols peuvent détruire de grandes surfaces de prairies.
Les pullulations de campagnols peuvent détruire de grandes surfaces de prairies.
Exemples de dégâts infligés par les campagnols sur une prairie (vue de loin)
Exemples de dégâts infligés par les campagnols sur une prairie (vue de loin)

La difficulté de la culture de l’herbe en zone de plaine en période de sécheresse

Gérer un système fourrager, c’est s’adapter à de multiples contraintes (climat, nature de sols…) qui sont aussi nombreuses qu’il y a d’exploitations dans la zone Comté. En altitude comme en plaine, le déficit fourrager est limitant. Exemple du GAEC du Chaillot à Auxange près de Dole (Jura).

Les 80 vaches du GAEC du Chaillot disposent de 40 ha de pâturages. « Nous n’avons pas assez de pâturage à proximité du bâtiment, aussi nous complétons avec un affouragement en vert (trèfle-ray grass) selon les saisons, durant les mois d’été les plus secs, à raison d’un repas quotidien donné au pâturage où les vaches restent pendant la nuit », explique Xavier Lyet. Les 40 ha autour de l’exploitation sont coincés entre l’autoroute et la forêt. « Nous avons repris cette ferme en 2005 avec un bâtiment et une salle de traite, du stockage pour le foin ». C’était l’opportunité d’installer le 3e frère sur l’exploitation, mais qui a bouleversé l’équilibre fourrager en doublant le nombre de vaches.
Les éleveurs cherchent des solutions : ils vont semer plus d’herbe en intercultures (ray grass), qu’ils faucheront en septembre. Ils ont bien pensé semer plus de pâturage mais le parcellaire éloigné obligerait à faire 1 à 2 km de route. « On rouspète déjà après les agriculteurs quand 20 vaches traversent le village, alors 80 ! ».

Les associés du Gaec, de gauche à droite : Xavier, Pierre et Étienne Lyet.
Les associés du Gaec, de gauche à droite : Xavier, Pierre et Étienne Lyet.

Un déficit de 200 tonnes de foin
En 2011, la sécheresse de printemps a particulièrement affecté l’exploitation qui comporte une partie de sols séchants. « Nous n’avions vraiment plus rien dans les pâtures. Nous avons dû ressemer du trèfle, mais il n’a pas levé. Nous avons essayé du moha, qui a bien poussé mais qui est difficile à sécher ». Dès le mois d’avril, les éleveurs ont été obligés de distribuer du foin à leurs vaches en complément. Avec une première coupe d’herbe déficitaire, il a manqué 200 tonnes de foin sur l’exploitation. « Pourtant notre zone n’a pas été retenue en calamité sécheresse », regrettent les éleveurs. « Nous avons toujours fait du lait à Comté, nos parents avant nous. L’objectif est de produire raisonnablement pour avoir un bon prix de lait ».

Avec l’arrêt des quotas, vont-ils saisir l’opportunité de produire plus de lait ? 
« Ce n’est pas envisageable. On est déjà limité par les bâtiments et nos surfaces en herbe. Il nous faut sans cesse nous adapter au climat, ajuster les rations plusieurs fois dans l’année ».

Repères.- Quantité annuelle de complément alimentaire : 1 700 kg par vache. Production laitière annuelle : 550 000 litres, soit 183 000 litres par associé. Surface : 230 ha dont la moitié en herbe.

L’affouragement en vert : un progrès technique ?

Quand la dimension des élevages augmente, les surfaces accessibles aux pâturages ne suivent pas toujours cette évolution. Quelles solutions ?

« Dans l’esprit des éleveurs, il faut toujours de grandes surfaces pour pouvoir pâturer, ce qui n’est pas forcément le cas. Même avec un grand troupeau, il est possible de s’organiser pour pâturer », précise Pierre-Emmanuel Belot de Jura Conseil Élevage. Le trou d’herbe se situe surtout en été. « Parce que c’est plus difficile en juillet et en août, on peut tomber dans le travers d’amener de l’herbe à l’auge toute l’année. Il serait dommage de ne pas pâturer au moment où l’on peut le faire, d’autant que l’affouragement en vert coûte entre 5 et 7 fois plus cher que l’herbe pâturée ». Des solutions sont possibles pour réorganiser les surfaces et optimiser l’herbe. « Ne faisons pas le raccourci entre grands troupeaux et pâturage impossible. Tout dépend de la structure de l’exploitation. Certaines exploitations ont réalisé des échanges de parcelles pour avoir du pâturage facilement accessible autour du bâtiment. Tout dépend aussi de la définition que l’éleveur donne d’une parcelle “accessible”… Dans le meilleur des cas, l’organisation du pâturage peut se réfléchir bien avant l’implantation du bâtiment.»

L’affouragement en vert, tant qu’il est utilisé ponctuellement et en cas de vrai déficit d’herbe, permet de conserver une ration de base “herbe”. Quand cette pratique devient systématique, au détriment du pâturage, elle n’est pas au service de la valorisation de l’herbe. Et elle est contradictoire avec le cahier des charges du Comté.

Pierre-Emmanuel Belot
Pierre-Emmanuel Belot

La chaleur des villes pour sécher l’herbe

Des agriculteurs du secteur de Pontarlier veulent utiliser de l’énergie disponible sur le territoire pour déshydrater des fourrages sous forme de granulés.
L'herbe coupée passe dans un sécheur à basse température avant d'être transformée en granulés.
L’herbe coupée passe dans un sécheur à basse température avant d’être transformée en granulés.

Cette unité de déshydratation collective de la société Deshy25 (agriculteurs, SMETOM, syndicat de traitement des déchets ménagers) fonctionnera avec la chaleur du site d’incinération de Pontarlier, dont une partie seulement est utilisée en hiver pour le chauffage de locaux. L’idée est d’utiliser la chaleur perdue en été pour produire 27 000 Mwh qui seront destinés à sécher 31 700 tonnes de fourrage, transformées ensuite en granulés d’herbe. Le projet porte sur 9 500 tonnes de granulés par an et concerne potentiellement 1 500 ha de prairies en 4 coupes limitées à 1,5 à 2,5 tonnes de matière sèche par hectare, afin de disposer de la qualité protéique et nutritionnelle nécessaire. Comme toute innovation touchant à la filière Comté, ce projet donnera lieu à un débat au sein du CIGC et notamment de la commission technique “Aliments du bétail”.

Comment harmoniser la conservation de la biodiversité avec la production agricole ?

Des solutions sont recherchées avec l’implication directe des agriculteurs dans la reconquête de la biodiversité. Dans le secteur de Bouverans (Doubs) par exemple, un état des lieux des prairies de fauche de montagne a été réalisé sur les 6 exploitations agricoles qui livrent leur lait à la Fromagerie de Bouverans.

En 2010, la cartographie des habitats d’intérêt communautaire du site Natura 2000 du bassin du Drugeon avait mis en lumière une baisse préoccupante du nombre d’espèces emblématiques dans ces prairies. Or cette flore est jugée caractéristique du terroir à Comté. La préoccupation de conservation de la biodiversité rejoint donc ici directement celle de la ressource agricole et économique du terroir.

Des journées d’échanges de terrain ont permis de mieux connaître le sol, la flore et les pratiques des exploitants agricoles de Bouverans. Cette étude menée par des spécialistes (pédologues, botanistes et techniciens agricoles) s’appuie sur des échanges constructifs avec les agriculteurs qui sont acteurs du diagnostic. L’objectif est de prendre en compte le contexte économique des exploitations et les possibilités de modifications de pratiques (fauche tardive, baisse de la fertilisation, lutte contre le tassement des sols…), avec des leviers techniques et économiques adaptés.

Une prairie de fauche de montagne de référence en très bon état de conservation peut contenir 50 espèces botaniques différentes. Dans la zone AOP Comté, il n'est pas rare de trouver des prairies pérennes comptant entre 30 et 65 espèces.
Une prairie de fauche de montagne de référence en très bon état de conservation peut contenir 50 espèces botaniques différentes. Dans la zone AOP Comté, il n’est pas rare de trouver des prairies pérennes comptant entre 30 et 65 espèces.

Le rôle positif des prairies dans le stockage du carbone.- Dans le cadre des programmes européens “GreenGrass” et “CarboEurope”, les chercheurs de l’INRA ont étudié le rôle des prairies comme source ou puits de gaz à effet de serre (GES) dans un contexte de changement climatique. L’étude d’une vingtaine de sites européens indique que les prairies piègent en moyenne 2,2 tonnes de carbone par hectare et par an et que le bilan net est équilibré.

L’activité de puits est plus élevée (de 0,1 à 0,3 tonne équivalent CO2) en prairie extensive qu’en prairie intensive. La diversité des espèces végétales présentes dans les prairies joue également un rôle : les plantes à fort développement souterrain (racines ou rhizome) favorisent le stockage du carbone.

Une société néerlandaise encourage le pâturage.- Alors qu’en France, certains départements envisagent d’installer des “usines à lait” de 1 000 vaches qui ne sortiront pas de leurs bâtiments (projet de méthaniseur dans la Somme), une information surprenante et inattendue nous arrive de l’autre pays du fromage : l’entreprise laitière internationale FrieslandCampina versera aux éleveurs Néerlandais une aide de 45 millions d’euros sur la période 2012-2014, pour encourager le pâturage 6 heures par jour pendant 120 jours minimum par an.

Comment harmoniser la conservation de la biodiversité avec la production agricole ?

Des solutions sont recherchées avec l’implication directe des agriculteurs dans la reconquête de la biodiversité. Dans le secteur de Bouverans (Doubs) par exemple, un état des lieux des prairies de fauche de montagne a été réalisé sur les 6 exploitations agricoles qui livrent leur lait à la Fromagerie de Bouverans.

En 2010, la cartographie des habitats d’intérêt communautaire du site Natura 2000 du bassin du Drugeon avait mis en lumière une baisse préoccupante du nombre d’espèces emblématiques dans ces prairies. Or cette flore est jugée caractéristique du terroir à Comté. La préoccupation de conservation de la biodiversité rejoint donc ici directement celle de la ressource agricole et économique du terroir.

Des journées d’échanges de terrain ont permis de mieux connaître le sol, la flore et les pratiques des exploitants agricoles de Bouverans. Cette étude menée par des spécialistes (pédologues, botanistes et techniciens agricoles) s’appuie sur des échanges constructifs avec les agriculteurs qui sont acteurs du diagnostic. L’objectif est de prendre en compte le contexte économique des exploitations et les possibilités de modifications de pratiques (fauche tardive, baisse de la fertilisation, lutte contre le tassement des sols…), avec des leviers techniques et économiques adaptés.

Comment harmoniser la conservation de la biodiversité avec la production agricole ?

Des solutions sont recherchées avec l’implication directe des agriculteurs dans la reconquête de la biodiversité. Dans le secteur de Bouverans (Doubs) par exemple, un état des lieux des prairies de fauche de montagne a été réalisé sur les 6 exploitations agricoles qui livrent leur lait à la Fromagerie de Bouverans.

En 2010, la cartographie des habitats d’intérêt communautaire du site Natura 2000 du bassin du Drugeon avait mis en lumière une baisse préoccupante du nombre d’espèces emblématiques dans ces prairies. Or cette flore est jugée caractéristique du terroir à Comté. La préoccupation de conservation de la biodiversité rejoint donc ici directement celle de la ressource agricole et économique du terroir.

Des journées d’échanges de terrain ont permis de mieux connaître le sol, la flore et les pratiques des exploitants agricoles de Bouverans. Cette étude menée par des spécialistes (pédologues, botanistes et techniciens agricoles) s’appuie sur des échanges constructifs avec les agriculteurs qui sont acteurs du diagnostic. L’objectif est de prendre en compte le contexte économique des exploitations et les possibilités de modifications de pratiques (fauche tardive, baisse de la fertilisation, lutte contre le tassement des sols…), avec des leviers techniques et économiques adaptés.

A lire pour aller plus loin : Fréquence Réseau N° 31 : “Sécuriser son système fourrager”

Comment construire un système fourrager robuste qui permette de faire face à divers aléas comme les changements climatiques, les campagnols ? Devant un important déficit de fourrage pour l’hiver, ne vaut-il pas mieux adapter le troupeau au fourrage disponible que faire son quota à tout prix ? Dans son numéro d’avril, le Réseau d’Élevage pour le conseil et la prospective de Franche-Comté s’intéresse à ces questions à travers des résultats d’enquête, des témoignages, des simulations…

Publications disponibles dans les chambres d’agriculture de Franche-Comté et sur le site de l’Institut de l’élevage : http://www.idele.fr.

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